AEG 4159 User Manual Page 248

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La Révolution radicale de 1846
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protestante, l'Eglise, l'Etat et l'instruction, déjà fortement mis à mal pendant la période
représentative, sont définitivement désunis. A la force des baïonnettes qui les obligent à
abandonner la salle du Grand Conseil, les anciens bourgeois répondent par une politique de la
chaise vide qui va accélérer la réforme des institutions. Sur ce point, le comportement des
anciens bourgeois a bien involontairement aidé le nouveau pouvoir, alors que le but était
justement à l'inverse de le punir le plus possible. La force publique et surtout l'éducation vont
être les premiers bastions conservateurs laissés aux radicaux, qui vont rapidement les
réorganiser.
De plus, la réaction des anciens bourgeois représente une double rupture. En abandonnant
leurs postes, les professeurs démissionnaires de l'Académie ont également ouvertement
rompu, pour la première fois dans l'histoire genevoise, la vocation bourgeoise, qui jusqu'à
cette date avait toujours été sous-jacente aux actions de ceux qui se percevaient comme les
garants de la stabilité de l'Etat. La révolution est effectivement "radicale", ce qui pour autant
n'implique pas une disparition de la bourgeoisie.
Il n'est en effet guère possible d'abattre en quelques mois la construction de siècles entiers. Si
la politique de la chaise vide a concerné uniquement ce qui correspondrait de nos jours au
secteur public et profité aux réformes institutionnelles, les anciens bourgeois n'étaient pas
prêts à abandonner leurs associations bancaires, cœur de leur puissance économique. Une fois
le choc de la révolution passé, la résistance économique au nouveau pouvoir s'annonce
farouche. L'opposition conservatrice qui se forme acquiert d'autant plus de force que le
nouveau pouvoir en place offre de nombreux points d'attaque sur les questions économiques.
Pour financer l'Etat moderne, les radicaux empruntent, ce qui provoque l'ire des anciennes
autorités, qui n'imaginent pas qu'il soit envisageable d'endetter l'Etat. D'un autre côté
l'instabilité politique s'installe, rythmée par de vives campagnes électorales. Elle profite aux
conservateurs qui tiennent le rôle facile d'opposants systématiques.
La réaction à l'avènement d'une réelle démocratie à Genève n'a cependant pas enfermé les
anciennes familles bourgeoises dans un conservatisme aveugle. L'un des impacts majeurs de
la révolution radicale sur la population bourgeoise est le renforcement des idées libérales qui
l'ont accompagnée. Les radicaux désirent offrir des conditions favorables au développement
des entreprises privées. En le faisant, ils accélèrent le mouvement de conversion au
libéralisme d'une partie des conservateurs, qui se sont vite rendu compte qu'un retour à
l'ancien système politique n'est plus concevable.
Il est impossible de ne pas conclure un tel chapitre sans revenir sur James Fazy, le grand
artisan de la Genève moderne. Le mythe fazyste, cultivé depuis près de 150 ans, cache
l'essentiel du génie de ce personnage. Homme politique visionnaire, merveilleux jongleur de
l'opinion publique, James Fazy garde cependant face au monde des affaires une rancune
sévère. La volonté qu'il affiche de vouloir faire payer à l'ancien gouvernement les frais de la
révolution démontre qu'il n'arrive pas, une fois au gouvernement, à s'élever au-dessus de la
mêlée politique. Ce caractère dessert l'ensemble de l'œuvre du politicien, incapable de
ramener le calme dans la République. De quoi alimenter entre les deux camps politiques un
conflit qui dure jusqu'à son effacement total de la scène politique.
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